top of page
  • Photo du rédacteurJustine

Kim Jiyoung, née en 1982 de Cho Nam-joo

Dernière mise à jour : 26 août 2021



Cho Nam-joo est née en 1978 en Corée du Sud. Scénariste pour la télévision, elle publie en 2016 son premier roman, Kim Jiyoung, née en 1982. Dès sa sortie, le roman crée la polémique. C’est l’un des rares livres à avoir dépassé plusieurs millions d’exemplaires en Corée.


Kim Jiyoung est une femme ordinaire, affublée d’un prénom commun – le plus donné en Corée du Sud en 1982, l’année de sa naissance. Elle vit à Séoul avec son mari, de trois ans son aîné, et leur petite fille. Elle a un travail qu’elle aime mais qu’il lui faut quitter pour élever son enfant. Et puis, un jour, elle commence à parler avec la voix d’autres femmes. Que peut-il bien lui être arrivé ? En six parties, qui correspondent à autant de périodes de la vie de son personnage, d’une écriture précise et cinglante, Cho Nam-joo livre une photographie de la femme coréenne piégée dans une société traditionaliste contre laquelle elle ne parvient pas à lutter. Mais qu’on ne s’y trompe pas : Kim Jiyoung est bien plus que le miroir de la condition féminine en Corée – elle est le miroir de la condition féminine tout court.


MON AVIS


Grâce au portrait d’une jeune femme ordinaire, épouse et maman d’une petite fille, qui semble perdre l’esprit, en se mettant à parler à la place d’autres femmes, l’autrice donne à voir une société où les traditions pèsent de tout leur poids malgré les volontés de s’en émanciper. Au cours des six parties qui composent le roman, le lecteur découvrira bien vite que ce n’est pas un événement qui a déclenché les troubles de Jiyoung mais bien la somme des pressions et des attentes de la société qui pèse sur les filles. À travers son portrait, celui de sa mère et de sa grande-soeur, c’est tout un pan de l’histoire de la Corée que nous traversons, marqué par le sacrifice des femmes pour leur famille : la lutte pour l’ascension sociale, puis pour conserver des conditions de vie décentes, l’accès aux études, l’égalité salariale, la fin du statut de chef de famille, les attouchements dans les transports en commun, les agressions, les caméras cachées si tristement d’actualité... Avec un ton sans concession, Cho Nam-joo dresse le portrait d’une société oppressante sans pour autant céder à la caricature. Souvent cruels et ingrats, les hommes ne sont pas tous condamnés comme le mari de Jiyoung. Ils sont aussi présentés comme le produit d’une éducation où ils ont toujours tout obtenu du fait de leur statut de garçon. L’un des épisodes les plus marquants est peut-être l’injustice des repas où Jiyoung et sa sœur doivent se partager les miettes tandis que leur frère mange des raviolis. Mais ce qui marque le plus, c’est leur absence de rébellion ou de remise en cause. 

C’est un roman miroir de la société coréenne qui appelle à une véritable remise en question universelle de nos comportements à commencer par l’éducation des filles et des garçons.


CITATIONS


"Supposons que vous êtes à un meeting de bureau. Là, le patron de l'entreprise clientes se met à se comporter de façon un peu bizarre, disons qu'il cherche à vous toucher. Sans raison, il pose la main sur votre épaule, il effleure furtivement vos fesses. Hein, vous voyez ? Bien, dans ce cas, vous réagissez comment ? Vous d'abord, Mlle Kim Jiyoung.

Kim Jiyoung se dit qu'une réaction trop scandalisée ou trop sérieuse serait mal notée. Elle opta pour un mi-chemin.

- J'éviterais la situation le plus naturellement possible, en allant chercher des documents ou en me rendant aux toilettes.

La deuxième candidate répondit d'un ton ferme qu'il s'agissait à l'évidence de harcèlement sexuel, qu'elle le signalerait sur-le-champ et que si, en dépit de son avertissement, la personne ne changeait pas d'attitude, elle aurait recours à la loi. L'examinateur qui avait posé la question leva les sourcils et écrivit quelque chose sur son dossier. Sans s'en rendre compte, sans raison, Kim Jiyoung eut un sursaut.

La troisième candidate, qui avait eu le temps de réfléchir, parla à son tour.

- Je chercherais s'il n'y a pas de problème avec ma tenue vestimentaire ou avec mon comportement. Si quelque chose était susceptible d'avoir provoqué une action inconvenante du client, je rectifierais mon attitude."


"- Tu me dis de ne pas penser à ce que je vais perdre. Il est probable que je vais perdre ma jeunesse, certains réseaux comme mes amis par exemple, mon boulot, mes collègues, etc., mes projets personnels et mon avenir professionnel, tout, quoi. Mais toi qu'est ce que tu vas perdre, toi ?

- Et bien... Pour moi aussi ce ne sera plus comme avant... Il faudra que je rentre tôt, je ne pourrais plus voir mes amis aussi souvent, ça sera compliqué pour assister aux dîners d'équipe ou pour les heures supplémentaires. Et quand je rentrerai, il faudra que je t'aide alors que je serai claqué. Et puis quoi, pour toi et pour notre enfant, voilà, je serai chef de famille... c'est ma charge !"


"En 2014, l'année où Kim Jiyoung a démissionné, une femme sur cinq faisait de même en raison d'un mariage, d'une grossesse, des enfants à charge. En Corée, le taux d'activité économique des femmes diminue sensiblement autour des âges de maternité : entre 20 et 29 ans, 63,8% des femmes sont actives, entre 30 et 39 ans, ce taux chute à 58% avant de remonter à 66,7% après 40 ans."


"Dans le temps, on lavait le linge avec un battoir, on faisait bouillir le linge en faisant du feu avec du bois, on balayait, on frottait partout, pliés en deux. De nos jours, le linge, c'est la machine qui s'en occupe, le ménage, c'est l'aspirateur, pas vrai ? Je ne vois vraiment pas ce qu'il y a de si dur aujourd'hui pour les femmes."


"Pourquoi ma mère ne m'avait jamais dit que c'était si dur ? Non seulement sa mère, mais aucune femme de sa famille, aucune ancienne ni aucune amie ayant eu des enfants ne lui avait donné d'informations franches. Sur les petits et grands écrans on ne voyait que de jolis bébés et tout le monde disait que la mère était belle et formidable."


"Des gens qui gobent sans réfléchir un cachet à la moindre migraine, qui n'oublient pas de mettre de la pommade anesthésiante pour enlever un petit grain de beauté, disent aux femmes de mettre leur enfant au monde dans la douleur et d'oublier les menaces qui pèsent sur leur vie à cet instant."


"De fait, le temps de repos pour les mères au foyer gardant à domicile un enfant âgé de 0 à 2 ans est de quatre heures et dix minutes. Celui des mères qui mettent l'enfant à la garderie est de quatre heures et vingt-cinq minutes. Quinze minutes seulement d'écart. Donc le temps de la garderie n'est pas un temps de repos pour les mères. La différence c'est : faire les tâches domestiques avec ou sans l'enfant."


Vous pouvez le trouver ici

15 vues

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page